Camille Grelaud est l’autre membre du duo de photographes de nature morte Camille&Charlotte. Pour son mémoire de fin de cursus à Gobelins, l’école de l’image, elle souhaitait proposer une exposition profondément liée à son projet professionnel : la photographie de nature morte. Ce travail monstre a beaucoup impressionné le jury (et moi-même, je dois bien l’avouer) : c’était la seule proposition réellement interactive aux douanes et l’énergie fournie par Camille tout au long de sa dernière année de formation a finalement été récompensée. Le mémoire de Camille était spectaculaire, instructif et fun ! J’ai beaucoup apprécié visiter son exposition, et j’espère que vous saurez en voir la qualité à travers cet article.
Mais trêve de bavardages ! Camille Grelaud a également été blogueuse par le passé. Aussi il était logique qu’elle prenne la parole dans cet article invité afin de vous présenter elle-même son projet.
Le parcours de Camille Grelaud
Quel métier veux-tu faire plus tard ?
Cette question nous est posée dès notre plus jeune âge, mais pour moi elle a pris tout son sens en troisième. Mes résultats étaient moyens à cause de mes problèmes de dysorthographie et j’avais donc des difficultés à l’apprentissage malgré ma soif d’apprendre. J’ai eu un rendez-vous avec un conseiller d’orientation qui, je peux dire, a défini mon avenir. Je ne savais pas quel métier je souhaitais faire, mais j’avais une passion naissante pour la photographie. On m’a donc proposé d’aller en bac pro photographie.
Je ne voulais pas y aller, j’avais peur de faire ce choix de vie trop tôt, mais une remarque du conseiller m’a convaincue « tu veux aller en bac général et risquer de te casser la gueule ou aller en bac pro et être la meilleure de ta classe ? ». Si c’était mal dit, il n’avait toutefois pas tort.
Suivre une formation
Me voilà donc en septembre 2013 en bac professionnel photographie. La classe de première a été particulièrement difficile « Qu’est-ce que je fais ici ? C’est un métier sans avenir stable avec peu de débouchés. Je ne me vois pas travailler à seulement 18 ans ». Mais lors d’un stage cette même année, j’ai rencontré des personnes qui m’ont fait comprendre que c’était un métier certes difficile, mais merveilleux et qu’il avait une possibilité de poursuite d’étude après le bac : Gobelins, l’école de l’image. C’est devenu très vite un objectif, et j’ai tout fait pour y arriver.
Le bac en poche je suis donc rentrée en Prépa à Gobelins puis ai été acceptée en Bachelor Photographie dans la même école. Durant ces 4 années, j’ai rencontré des personnes toutes aussi différentes qu’animées par la même passion.
Fonder son entreprise
Aujourd’hui en 2021 diplômée d’un bachelor photographe vidéaste de Gobelins, l’école de l’image, je peux enfin répondre avec assurance et fierté a cette question « quel métier je veux faire ou plutôt quel métier je fais ? ». Je suis actuellement photographe de nature morte et directrice de ma société Camille&Charlotte avec mon associée Charlotte Fouillet.
Dès le début, travailler ensemble s’est fait naturellement, et c’est au cours de notre 3ème année de bachelor que nous avons décidé d’unir nos talents une fois diplômées. Nous nous passionnons pour la nature morte, autant pour la minutie et la technique qu’elle demande, que pour la liberté d’imagination qu’elle permet. Fortes d’une volonté d’allier réflexion artistique et travail publicitaire, nous avons développé ensemble une esthétique commune, à la fois ludique, pleine de couleurs et marquée par une attention particulière aux détails. Nous sommes aujourd’hui représentées par AMG Paris.
Photo par Lauréline REYNAUD
Nous avons également co-fondé le collectif Les Acanthes, avec quatre de nos camarades de Gobelins.
Un mémoire de fin de cursus didactique
Pour mon mémoire de fin d’études je voulais m’inspirer de mon parcours et je me suis donc demandé comment faire connaitre le métier de photographe de nature morte de publicité à des non-initiés et pourquoi pas, provoquer des vocations.
Ce qui me passionne dans le métier de photographe de nature morte c’est la création d’une image, c’est-à-dire toute la partie cachée des photographies qu’on retrouve dans nos magazines ou dans le métro, de la découverte du produit à la réalisation du shooting en passant par la direction artistique. J’avais donc mon idée : réaliser une série photographique et une exposition pour faire découvrir ce métier.
Ayant une mémoire kinesthésique, j’ai besoin d’utiliser les sens du toucher, de l’odorat et tout ce qui est en relation avec les sensations et les émotions pour apprendre et comprendre. Le côté ludique d’une exposition est donc très important pour que je m’en souvienne et cela passe en grande partie par la scénographie, et par des interactions avec les œuvres. En conséquence, il me semblait important que l’exposition que je souhaitais réaliser soit la plus interactive possible. Parallèlement, le côté ludique de cette exposition donnerait des éléments pour attiser la curiosité du public envers la pratique de la nature morte publicitaire, car comme le dit Daniel Pennac dans son essai Comme un roman (1995) « On ne force pas une curiosité, on l’éveille ».
Créer une nature morte publicitaire
Pour ce faire, il m’a fallu tout d’abord, réaliser les images. J’ai imaginé une commande publicitaire avec deux intentions afin de montrer que le choix de la direction artistique est primordial et qu’avec un même objet, mais deux intentions différentes, le résultat peut changer du tout au tout. Avec cette commande, j’ai pu réaliser un moodboard pour chaque intention et rechercher du stylisme au besoin. Une fois tout cela prêt, j’ai shooté.
Il y a eu deux journées de prise de vue : une dédiée à chaque intention. Lors de celles-ci, j’ai réalisé plusieurs photos des étapes de la mise en place du set, qui ont ensuite été insérées dans les installations : le spectateur les découvrira au fur et à mesure de ses actions dans l’espace d’exposition. Ensuite, il ne me restait plus qu’à photographier l’image commandée en me basant sur le moodboard.
Imaginer une scénographie ludique sur la nature morte
Après avoir sélectionné et retouché les meilleures images, il m’a fallu créer la scénographie à base d’interactions ludiques. La scénographie est la façon dont on agence et met en scène une exposition, elle se compose avec des volumes, des objets, des couleurs, des lumières, et des textures. Pour celle qui nous concerne, je voulais que les spectateurs soient acteurs de leur visite. C’est pour cela que je leur ai proposé de construire eux-mêmes une photo publicitaire grâce à des mécanismes manuels (des boîtes à ouvrir, des languettes à tirer, de lampes à allumer, etc.), afin qu’ils comprennent les procédés de la photographie de nature morte.
Cette exposition sur la pratique de la photographie de nature morte publicitaire est destinée et accessible à tous, que ce soient des passionnés de photo qui s’interrogent sur cette pratique, ou des familles pour une sortie week-end ludique et instructive pour les enfants comme pour les parents.
Pour finir, il m’a fallu réaliser concrètement l’exposition. J’ai fabriqué, avec l’aide de mon grand-père, tous les mécanismes et cadres que j’avais imaginés, j’ai imprimé les images, et enfin monter l’exposition à l’aide de mon père et des mes amies.
Vous expliquer en détail chaque élément de cette exposition serait surement trop long et peut intéressant, alors je vous laisse découvrir le livret d’exposition pour petits et grands que j’ai réalisé et laissé à disposition lors de ma soutenance, ainsi qu’une courte vidéo de présentation.
Retour d’expérience
Cette expérience, créer ma propre exposition entourée par mes proches, était juste incroyable. Mes soutenances (book et mémoire) à Gobelins, m’ont permis d’être recontactée très vite par une agence parisienne, qui représente aujourd’hui notre duo Camille&Charlotte.
Merci pour la découverte de cette discipline de la photographie que je ne connaissais pas !