Les réseaux sociaux dédiés à l’image sont nombreux. Parmi les plus utilisés pour partager des photographies, on trouve Instagram et Snapchat (les plus à la mode), mais aussi Flickr et Tumblr (qui résistent encore et toujours), Pinterest, Ello (le petit « nouveau ») et Facebook.

Mais pourquoi je me met à vous parlez de ça tout d’un coup ?

Le livre photo contre le reste du monde

Lors du campus étudiant des promenades photographiques de Vendôme, nous avons eu une grande discussion avec l’un des intervenants.

Ljubisa Danilovic est un photographe français membre du collectif Tendance Floue. Il est venu à Vendôme nous présenter son travail, principalement sous l’angle de la création et la composition de séries. Il insistait, puisque c’est le travail qu’il nous présentait, sur la forme du livre. Le livre comme support ultime à la série. Vient donc nécessairement la question des autres supports. Pourquoi le livre et rien d’autre ? Le livre photographique est en effet particulièrement à la mode. Pratique, tangible, parfois fourmillant d’informations, et souvent bien moins cher qu’un tirage, c’est l’objet le plus accessible au grand public.

Pour autant, je ne pense pas que ce soit le seul moyen de monstration aujourd’hui. Les expositions, quand elles sont pensées, sont toujours bien visitées et accessibles. Et…. Internet n’est pas en reste.

Les réseaux sociaux « néfaste » au monde de la photo ?

L’intervention d’une camarade

réseaux sociaux: vue d'Instagram, compte de @yeux.coccinelle

Lorsque j’ai posée ma question à Ljubisa, une camarade de Toulouse à tenter de me répondre, dans son sens. Elle évoquait la part grandissante d’influençeurs se prenant pour des photographes, sans en connaître le métier et ainsi causant une chute des prix.

Elle m’a surprise d’ailleurs, en n’évoquant pas le travail au noir ou les auto-entrepreneurs… Elle à également parler du “problème” de la standardisation de l’image photographique, qui deviendrait trop commune, banale, et perdrait alors de sa valeur (financière donc ?). Enfin, elle voulait me prouver que les réseaux sociaux sont néfaste à la Photographie (notez le p majuscule) puisque nous n’avons pas de contrôle sur l’affichage des images. Elle est restée en tout cas, dans une vision de la photographie uniquement comme Art.

La réalité

Or, la Photographie c’est (légèrement) plus que ça. C’est avant tout un médium et elle est de plus en plus pensée comme tel. C’est ce qui se passe actuellement dans le milieu de l’art (si on doit s’y concentrer): les artistes contemporains voir conceptuels utilisent régulièrement la photographie à d’autres fins qu’elle même. On la retrouve dans divers installations (Jan Dibbets), peintures, bandes dessinées, on l’utilise en performance, ou pour le land-art… Mais ce n’est pas tout. Les photographes ne sont pas tous des artistes, ne construisent pas tous leurs images en les imaginant sur le mur d’une galerie. Certains ont un propos à faire entendre. D’autres « aiment » juste l’actualité. Certains veulent simplement faire plaisir ou vendre…

Jan Dibbets, Big Comet 3°-60° Sky-Land-Sky, 1973
Jan Dibbets, Big Comet 3°-60° Sky-Land-Sky, 1973. Konrad Fischer Galerie

Les réseaux sociaux, c’est 1h20 en moyenne par jour passé par les Français. Instagram c’est quand même 1 milliard d’utilisateurs actifs au monde dont 12 millions en France. C’est aussi le 3e réseau social le plus utilisé par les Français derrière Facebook et YouTube. Facebook quant à lui n’est que le 3e site le plus visité… derrière Google.com et Google.fr.

Pourquoi vouloir s’en priver en tant que photographe alors que la population mondiale y est bien implantée ?

Une utilisation des réseaux sociaux adaptée

Que peuvent apporter les réseaux sociaux à un photographe ?

réseaux sociaux: vue de pinterest, compte de Par les yeux de la coccinelle

Si j’estime personnellement qu’il n’est pas bon pour un photographe ( /! distingo avec l’influenceur juste ici) de créer ses images dans l’optique de réussir sur Instagram, le réseau est tout de même à prendre en compte. Il est certes plus intéressant d’envisager l’édition d’un livre, la publication dans un magazine ou l’installation d’une exposition, mais se montrer le plus possible est presque devenu un pré-requis. Savoir se faire remarquer sur internet devient nécessaire pour être engagé par les grandes marques. Les réseaux sociaux deviennent alors un possible lieu de communication, de démarchage, de publicité en soi.

Les réseaux sociaux ont tous leurs codes et leur public cible. On ne va (doit) publier le même type de contenu d’un support à l’autre. La clientèle, le public n’est pas le même (entre des millenials sur snapchat et des professionnels sur linkedin) d’où l’importance de choisir ses moyens de diffusions.

  • Par exemple, si Instagram rencense une grande partie de la population, elle y reste jeune.
  • Le grand public est bien moins représenté sur Ello, qui reste une communauté dédié à l’image et principalement à la photographie.
  • De même Pinterest, s’il est un réseau spécifique à l’image également, est représenté par des femmes (70% selon pinterest, en 2017) et utilisée principalement pour de la collection personnelle.

Savoir définir son persona (personne fictive dotée d’attributs et de caractéristiques sociales et psychologiques et qui représente un groupe cible) est une des bases du marketing et est tout à fait nécessaire pour faire évoluer son entreprise. Savoir à qui l’on s’adresse pour mieux vendre. Que ce soit en photographie sociale, publicitaire ou documentaire. Connaitre son persona c’est connaitre son client cible idéal et s’adresser directement au 2% d’internautes acheteurs: savoir comment leur parler, quoi leur dire, comment poster sur les réseaux, sur lesquels, et à quel moment, pour que non seulement ils s’intéressent mais surtout qu’ils s’engagent.

Vers une nouvelle photographie

Que peuvent apporter les réseaux sociaux au monde de la photographie ?

Décider que La Photographie (le monde de) n’est constitué que de créations ayant pour vocation première l’ornement d’un mur, ou la collection, c’est occulter une très grande partie des images et de l’histoire de l’art. Exit la photographie de presse ou documentaire (Adieu cher Koudelka, Nachtwey, et Addario), exit la photographie commerciale (mes condoléances à Letinsky, Lemoigne, Sundsbo), les portraitistes (je vous aimais tant Leibovitz, Avedon, Bailey), et tous les autres domaines (social, scientifique, médical…). C’est enfin surtout créer une échelle de la “bonne” photographie et oublier la part majoritaire du vernaculaire.

La photographie est sans cesse en train de se renouveler. Elle n’est que très jeune, elle n’a même pas encore 200 ans. Pour comparaison, la perspective – pour le dessin et la peinture – a plus ou moins 570 ans…

réseaux sociaux: vu de snapchat

Aussi, les supports tendent à évoluer, tout comme les sujets. Si le portrait, les natures mortes (documents pour artistes) et le paysage étaient les utilisations principales dans les années 1850, la photographie à vite évolué et permit d’autres choses. La photo d’actualité apparait avec les barriquades de la Commune en 1871 et est suivie pas la photo scientifique (décomposition du mouvement en 1880). La photo est propulsé au rang d’œuvre d’art avec Walker Evans et Robert Franck dans les années 1930, précédé par la photographie publicitaire qui fait ses marques dans les années 1920. L’expérimentation artistique prend le pas avec le modernisme, suivie par la mode du vernaculaire dans les années 70.

Malgré les différents sujets, les différents supports (plaque de verre, film, papier, projection, etc…) l’image photographique est toujours restée assez élitiste. Le matériel peu abordable financièrement mais aussi techniquement ne laissait pas la place à monsieur/madame n’importe qui, jusqu’au début des années 2000 et l’apparition de l’appareil numérique, qui devient de moins en moins cher, de plus en plus automatisé, de plus en plus compact. Laissant même la place aux smartphones aujourd’hui. La photographie devient plus populaire. Et les réseaux sociaux affichent ces images. Ils ont fait naître une photographie plus égocentrique (coucou les selfies!) mais aussi en mouvement (salut les cinémagraphes!). De nouvelles formes visuelles. Ils permettent aussi une plus large diffusion, permettant à celui qui vit dans le Vaucluse de se montrer aux parisiens quand même…

cinemagraphe La voluspa, par Lauréline Reynaud
Cinemagraph de ma série La Völuspá

Pourquoi restreindre cet univers, imposer que LA photographie serait aux murs des galeries, aux éditions papiers, que tout un chacun ne peut s’offrir, ou ne souhaite nécessairement. N’est-ce pas plus simple de la laisser vivre ? D’utiliser les réseaux sociaux différemment si ce qui y est montré ne plait pas?

Pour conclure sur un partage: Emeric Lhuisset est photographe (artiste, auteur, vidéaste, tout ce que tu veux). Il est lauréat de la résidence BMW (et sera donc hébergé par l’école Gobelins cette année 2018-2019). En août 2012 il décide d’accrocher une camera sur le torse d’un combattant de l’armée syrienne libre. Il en résulte un plan séquence de 24h, en boucle, diffusé en temps réel: « Chebab«  . La question de la diffusion s’est posé à Emeric puisque personne ne peut regarder d’un coup la vidéo quant tenu de sa durée. Il a d’abord réaliser des extraits de quelques minutes des temps les plus intéressants. Puis en a sortie quelques images fixes afin de promouvoir ses extraits. Enfin en mars dernier, il décide de publier sa vidéo sur les réseaux sociaux pour toucher plus de monde. Il s’est penché sur Instagram puisqu’on parle de la vie, de la journée de quelqu’un. Et a décider de publier sous forme de capture d’écran 1 minute du film par jour, à l’heure exacte où l’évènement en question s’est produit. On se retrouve donc avec une scène de sieste qui dure des mois. Preuve de la banalité du conflit.

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08:20:12

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Publication sur le compte Instagram de Emerci Lhuisset

Et ça, c’est utiliser les réseaux sociaux à bon escient 😉

Posted by:Lauréline Reynaud

Photographe beauté diplômée de l'une des plus grande écoles de photographie Parisienne (Gobelins, l'école de l'image), je considère mon blog et mes réseaux comme un journal. J'y relate mes 5 années d'études et ma professionnalisation : retours d'expériences, conseils et astuces de prise de vue ou de retouche, curation de contenu et inspirations, discussions Business, etc.

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